Les comédies françaises en 2016 : pourquoi tant de suites ?
Les Visiteurs 3, Brice 3, Camping 3… 2016 sera l’année des suites pour la comédie française ! Comment expliquer un tel engouement ? A l’occasion du Festival de la comédie de l’Alpe d’Huez, nous avons posé la question aux visages de la comédie.
1. En 2016, place aux suites françaises !
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Pas moins de 8 suites de comédies françaises sont attendues sur les écrans français. 10 autres sont annoncées en tournage prochainement. Découvrez-les dans notre diaporama…
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2016 serait-elle une année record pour les suites de comédies françaises ?
Avec pas moins de 8 suites attendues sur les écrans ces prochains mois, sans compter les tournages en cours ou sur le point de commencer (voir notre diaporama), la réponse est oui! On peut sans trop s’avancer parler d’un engouement fort, et sur la durée, pour les suites en France. Les annonces récentes de suites de Boule et Bill et Neuilly sa mère le confirment, et préfigurent déjà une année 2017 placée aussi sous le signe des franchises et suites françaises…
A l’occasion du Festival de la comédie de l’Alpe d’Huez, qui s’est achevé il y a quelques jours, nous avons demandé aux talents présents quel était leur point de vue sur cette tendance forte de la comédie française… De Marilou Berry à Pierre Niney, en passant par Edouard Baer, Jean-Paul Rouve, Olivier Baroux, Lucien Jean Baptiste, Ramzy, Franck Gastambide et Michèle Laroque, voici leur sentiment sur cette question.
Marilou Berry (prochainement à l’affiche de Joséphine s’arrondit)
Marilou Berry : Quand on aime des personnages, on a envie de les voir dans d’autres aventures. Dans le cas de Joséphine, c’est un personnage qui peut traverser énormément de choses. C’est comme Martine à la plage. En plus de ça, c’est un personnage dans lequel les gens se retrouvent énormément. Elle est déclinable dans plein de choses.
Joséphine est un personnage qui peut traverser énormément de choses. C’est comme Martine à la plage…
Je pense par exemple aux films de Pierre Richard qui n’étaient pas des suites en soi, mais il traversait plein de films. Ou les films de De Funès… Tous ces films des années 70-80 qui ont fait la gloire aussi du cinéma français. Ce n’est pas un mal, ce n’est un signe de manque de renouveau. Par exemple, je trouve ça beaucoup plus décevant du côté américain, où aujourd’hui il n’y a quasiment plus de création. On ne fait que reprendre pour faires des avants, des après… J’ai vu qu’ils allaient refaire Les Goonies, Gremlins, Ghostbusters… C’est beaucoup plus triste de refaire un film qui a déjà existé que de faire poursuivre les aventures d’un personnage qu’on a déjà aimé.
Quid d’un Super Vilaine, une suite à Vilaine ?
Marilou Berry : Vilaine est un personnage qui est beaucoup plus compliqué à décliner. Quand on m’a parlé d’une suite, j’ai dit : oui, je veux bien lire un scénario. Je serai curieuse de voir quelle est la suite des aventures de Vilaine. Vilaine est un film concept sur un personnage qui se transcende. Une fois qu’il est transcendé, que faire à part se répéter ? Et du coup, créer autre chose. Joséphine est un personnage qui traverse des aventures. Ils ont essayé pendant un moment d’écrire une suite, mais il n’y a jamais eu de scénario suffisamment concluant pour qu’on puisse envisager de le tourner.
Joséphine s’arrondit, réalisé par Marilou Berry, arrivera sur les écrans mercredi 10 février
Joséphine s'arrondit Bande-annonce VF
Olivier Baroux (actuellement à l’affiche de Les Tuche 2 – Le rêve américain)
Olivier Baroux, réalisateur : On a fait Pamela Rose 1 et 2, on a déjà fait des suites. Si vous avez une bonne histoire, ce n’est pas un problème de faire une suite.
Nous, en l’occurrence Les Tuche 1 n’a pas été un énorme succès, en sortie salles, ça a fait 1,6 million. Ce qui est bien, mais ce n’est pas un énorme succès comme Camping par exemple. On a fait cette suite vraiment pour des raisons artistiques.
Lorsqu’on a tourné Les Tuche, on n’avait absolument pas idée de faire le 2
Lorsqu’on a tourné le 1, on n’avait absolument pas idée de faire le 2. C’est le public qui a décidé du 2 en fait. Quand on a vu l’engouement, quand on a entendu les gens nous dire ‘je le regarde une fois par mois avec mes enfants, je connais les répliques par cœur’. Sur Internet, des gens s’amusent à faire des remix avec les meilleures répliques du film. Tout ça, ce sont des signes qui vous disent que les gens se sont complètement appropriés le film et ça devient un objet familial.
Comment expliquer toutes ces suites ? J’imagine que les producteurs se disent ‘on a fait un beau succès avec celui-là, on peut en faire encore un autre.’ Moi je ne suis pas producteur, je ne suis pas dans leur tête. Je ne sais pas du tout comment ils réagissent, comment ils pensent.
On se calque aussi un peu sur les Américains pour ça, qui ont ce qu’on appelle des marques
On se calque aussi un peu sur les Américains pour ça, qui ont ce qu’on appelle des marques. Et c’est vrai que maintenant, il y a tellement de films, plus de 600 films par an tout confondu, que si vous arrivez sur le marché avec une marque déjà connue du public, qui connait l’univers et les personnages du film, c’est vrai que vous avez déjà fait la moitié du chemin en termes de marketing. Il ne faut pas faire que des suites, mais c’est vrai que c’est tentant.
Vous sentez-vous plus confiant à l’idée de sortir une suite ou c’est le contraire ?
C’est à double tranchant. Comme je viens de vous le dire, la moitié du chemin est fait. Par exemple, l’affiche des Tuche 2 est proche du premier, et vous donnez comme signe au spectateur qu’ils vont retrouver ces personnages qu’ils connaissent déjà, ça le travail est fait. Après, si vous faites une mauvaise suite, si vous décevez les gens, s’ils ne retrouvent pas la même humeur que dans le 1, ça peut être la catastrophe. Il faut être très vigilant. Vous ne pouvez pas vous dire ‘non, mais c’est bon. Même si je raconte une histoire pourrie, ça va le faire, ils vont venir.’ Donc, c’est plus facile de présenter le film, mais plus difficile de l’écrire.
Les Tuche 2 – Le rêve américain Bande-annonce VF
Jean-Paul Rouve (actuellement à l’affiche des Tuche 2)
Jean-Paul Rouve : Moi, suite ou pas suite, je m’en fous. La question est ‘est ce que c’est un bon film ?’ Mais c’est toujours pareil, on est toujours décalé de 10 ans avec les Américains. Ca fait 10 ans que les Américains font ça, ça arrive chez nous.
Ca fait 10 ans que les Américains font ça, ça arrive chez nous
Mais je trouve ça très bien qu’il y ait Camping 3, les Visiteurs, Brice de Nice… Après, c’est un métier économiquement difficile, donc je peux aussi comprendre des producteurs qui vont vers ce qu’ils pensent peut être un peu plus marcher parce que les gens connaissent. Mais il ne faut pas que ça empêche évidemment des créations.
Plutôt que de réaliser la suite des Kaïra au cinéma, Franck Gastambide a décidé de réaliser Pattaya, un film avec un esprit proche de l’humour des Kaïra, mais dont l’histoire est indépendante des Kaïra
Pattaya Teaser (2) VF
Ramzy (prochainement à l’affiche de La Tour 2 Contrôle Infernale et Pattaya) & Franck Gastambide (Pattaya*)
Franck Gastambide : Je pense qu’on fera Les Kaïra 2, mais on prendra sûrement le chemin d’Eric & Ramzy avec La Tour 2 Contrôle Infernale. Ils ont fait beaucoup de films entre les deux (15 ans se sont écoulés entre les deux volets, Ndlr.) et c’est super.
Tu as complètement le droit de faire plaisir au public et leur resservir ces personnages. Mais nous après Les Kaïra, quand tu n’as fait que Les Kaïra, et derrière de faire encore Les Kaïra, on ne serait jamais des acteurs avec Medi, on serait les mecs des Kaïra. Donc il fallait qu’on existe, qu’on fasse d’autres choses. Les Kaïra nous ont donné la possibilité de faire plein d’autres choses, plein d’autres rôles.
Le bon chemin, c’est celui d’Eric et Ramzy. Ils ont fait d’autres choses et reviennent à leurs premières amours
Je suis sûr qu’on va se retrouver, mais le bon chemin, c’est celui d’Eric et Ramzy. Ils ont fait d’autres choses et reviennent à leurs premières amours.
Ramzy : Pour faire un deux, ce sont les gens qui doivent le demander. J’ai toujours trouvé ça bizarre de sortir une suite l’année d’après.
Pour La Tour 2 Contrôle Infernale, ça a pris de l’ampleur petit à petit, les gens nous demandaient de plus en plus une suite. Ils en avaient marre de l’avoir vu 50, 100 fois. ‘Donnez nous en un autre car celui-là on le connait par coeur’ ! Du coup, voilà, 14 ans après, on y est retourné. Et on avait très envie de refaire les gogols avec Eric.
Eric & Ramzy dévoileront ce mercredi la suite de La Tour Montparnasse Infernale. Un nouveau film qui s’annonce inattendu…
Eric & Ramzy : La Tour 2 Contrôle infernale, une suite "inattendue"
Edouard Baer (actuellement à l’affiche de Encore heureux*)
Edouard Baer : On peut voir un aspect cynique et marketing là-dedans ‘ça a marché, on va faire des entrées’. Moi je crois plus joliment que si on a aimé les aventures de quelqu’un, si on a aimé les personnages, on a envie de voir ce qu’ils deviennent, et donc on a raison de le faire, sauf si c’est une oeuvre unique. Comme spectateur, moi ça m’amuse : si j’ai laissé des personnages à un moment de leur vie, qu’on a adoré ça, pourquoi on ne les reverrait pas ? 20 ans plus tard de Lelouch, c’est aussi ça. Si le marketing s’en empare, c’est parce que, nous, spectateurs, on a soif de ça.
Lucien Jean Baptiste et Baptiste Lecaplain (prochainement à l’affiche de DieuMerci*)
Baptiste Lecaplain : Mes films cultes sont Retour vers le futur 2, Rocky 2… Quand une suite est réussie, je trouve ça cool. Ca prouve qu’on croit aux personnages, qu’on y est attachés. J’aurais aimé voir les suites de certains films qui n’existeront jamais. J’aurais aimé voir La Cité de la peur 2; j’aurais été comme un dingue ! Qu’il y ait le chiffre 1, 2, 3, 4, si le film est fait sincèrement, ça ne me dérange pas.
Je pense qu’il y a des gens sincères qui veulent vraiment faire des vraies suites cool, comme Babysitting 2. C’est bien qu’ils l’aient fait directement derrière. Tout le monde avait refusé Babysitting. Que le truc ait cartonné et qu’il enchaine avec le deuxième, c’est noble et ça marche, c’est super.
Lucien Jean Baptiste : En tant que spectateur, on a envie de se régaler, faites nous le 2, le 3… On a envie de spectacle, très bien. En tant que créateur, j’aime bien changer. Je trouve que ça manque un peu de… Je me dirais, en tant que créateur, que je manque d’idées pour autre chose. Un bis repetita pour un créatif, ça m’ennuie un petit peu. Après, le cinéma est une industrie, il y a le Coca, le Coca Light, le Coca Zéro, le Coca vert… Faites moi un bon film, en tant que spectateur, ne vous foutez pas de moi.
Il n’y a rien de pire qu’une suite qui est bâclée. C’est pour ça que je mets beaucoup de temps à faire la suite de La Première étoile parce que je veux avoir un vrai truc à raconter
Il n’y a rien de pire qu’une suite qui est bâclée. C’est pour ça que je mets beaucoup de temps à faire la suite de La Première étoile parce que je veux avoir un vrai truc à raconter. Si on me dit que je le fais uniquement pour des raisons marketing, ah non ! Si je vois un 2 qui est pourri, je ne m’en remettrais pas.
Je préfère prendre un risque sur une nouveauté, un autre film, qui ne marche pas, plutôt que de ne pas prendre de risque, faire une suite et que ça soit naze.
En attendant de peut être donner une suite à La Première étoile, Lucien Jean Baptiste a réalisé un nouveau long métrage, avec Baptiste Lecaplain : DieuMerci
DieuMerci ! Bande-annonce VF
Pierre Niney & François Civil (prochainement à l’affiche de Five* d’Igor Gotesman)
François Civil : Ca devient des films tellement populaires que les gens se les approprient, et donc c’est leur faire un cadeau que de continuer l’aventure des personnages, auxquels ils sont attachés, pour lesquels ils ont tellement ri…
Pierre Niney : Ca c’est le côté noble de la chose, qui est vrai quand ça vaut le coup d’en faire un 2. Après, sans être cynique, c’est vrai que le succès commercial pousse les producteurs souvent à en faire un deuxième. Ce n’est pas toujours une bonne idée. Parfois oui, parfois non.
Il y a un côté parfois un peu déprimant comme quand on va dans un fast food : “On sait ce qu’on va avoir, pas de surprise et pas de déception totale non plus”
Il y a l’idée de fidéliser les gens à quelque chose qu’ils connaissent, et à la fois, il y a un côté qui est beau quand on parle de suite comme Toy Story, des suites qui sont belles et qui te font découvrir des personnages encore plus profondément, et que tu continues à les suivre. Et en même temps, il y a un côté parfois un peu déprimant comme quand on va dans un fast food : « On sait ce qu’on va avoir, pas de surprise et pas de déception totale non plus. » Ca c’est un peu triste. Je pense surtout aux films américains, les franchises…
Malgré son titre Five, signifiant 5, Five est bien une création originale, imaginée par Igor Gotesman à qui l’on doit la série Casting(s) sur Canal+
Five Teaser (2) VF
Michèle Laroque, prochainement à l’affiche de Camping 3
Michèle Laroque : Je pense que quand les gens ont vraiment aimé un film avec une certaine distribution, ils ont très envie de retrouver l’esprit et l’ambiance. C’est quelque chose de légitime d’avoir envie de retrouver des choses qui nous ont plues et qui nous sont familières, mais en même je connais plein d’amis qui disent ‘on ne va pas faire pour faire une suite”. On fait une suite si on a une vraie idée. Donc c’est plutôt raisonnable et digne.
L’Idéal, suite de 99 Francs, figure parmi les autres suites à venir en 2016. Voici le teaser avec Gaspard Proust reprenant le rôle tenu par Jean Dujardin dans le précédent volet
L'Idéal Teaser VF
Propos recueillis au Festival de la comédie de l’Alpe d’Huez 2016
* Précisons que les films suivis d’une * ne sont pas des suites. Nous avons profité de la présence des talents en promotion pour ces films pour les interroger sur cette tendance
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