Coronavirus : Voici pourquoi le pangolin mérite qu’on s’intéresse à lui pour autre chose que le Covid-19
En mars 2020, le pangolin, cette « pomme de pin sur pattes », a doublé temporairement l’emblématique lion au jeu des requêtes Wikipedia mondiales. En pleine crise sanitaire, ce mammifère mystérieux, le seul à avoir des écailles kératinisées sur quasiment l’ensemble du corps, a été soupçonné d’être l’hôte intermédiaire du SARS-CoV-2. « Cette information, reprise sans les précautions scientifiques d’usage, aurait pu être catastrophique pour le pangolin, alors qu’il est innocent. Il a bien un virus de type SARS-CoV-2 mais génétiquement trop éloigné de celui qui est à l’origine de la pandémie humaine », s’insurge Philippe Gaubert, directeur IRD au Laboratoire Evolution et Diversité Biologique de Toulouse (Université Paul-Sabatier) .
Mais le chercheur est bien placé pour savoir que le pangolin a tout un tas d’autres raisons que cette célébrité malvenue de se mettre en boule : depuis l’avènement du Covid-19, il a entrepris avec son doctorant Sean Heighton, un recensement exhaustif, et remontant à plus d’un siècle, de toutes les données scientifiques liées au mystérieux animal.
Peu de recherches pour le préserver
Premier constat de cette « revue systématique », publiée en avril dans le journal scientifique Biological Conservation, le pangolin ne bénéficie pas du même statut, auprès du grand public, que les espèces emblématiques de la conservation comme l’éléphant ou le lion, alors qu’il est tout simplement le mammifère le plus braconné au monde. Ses huit espèces asiatiques et africaines sont même classées depuis 2019 de « vulnérables » à « en danger critique » par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). « Pourtant l’état des connaissances scientifiques est faible, explique le chercheur. On sait très peu de choses sur cet animal nocturne discret, qui se nourrit exclusivement de termites et de fourmis. Sur le contrôle des populations que les pangolins exercent sur ces espèces potentiellement ravageuses par exemple ».
Découvrez cette étude consacrée aux #pangolins par Sean P. Heighton, doctorant #UT3 et Philippe Gaubert, chercheur @ird_fr rattaché au @EDB_Lab ! https://t.co/8QRGzwVfPQ
— UT3 Paul Sabatier (@UT3PaulSabatier) March 17, 2021
Si depuis les années 2010 et l’annonce de son statut d’espèce la plus braconnée puis d’hôte intermédiaire du coronavirus, beaucoup plus d’équipes scientifiques travaillent sur le pangolin, il existe peu de données antérieures, notamment sur les approches possibles pour le préserver. « Notre conclusion, c’est qu’il est préférable d’opter pour une approche globale quant à la problématique de conservation des pangolins et de protéger ces espèces pour les bonnes raisons », insiste Philippe Gaubert.
Un boom inquiétant des brevets sans fondement scientifique
Car les mauvaises sont légion. Et notamment les supposées vertus médicinales des écailles de l’animal, dont la pharmacopée chinoise est friande. La dynamique du nombre de brevets concernant l’utilisation de dérivés liés aux pangolins n’est pas liée aux recherches biomédicales sur l’espèce. Sean Heighton en a identifié 5.200, avec un véritable boom, au rythme de 800 dépôts par an, entre 2013 et 2015. « Il y a une bulle artificielle qui s’est créée pour produire un marché », analyse Philippe Gaubert. Sur des bases assez délirantes car si la pharmacopée chinoise a documenté depuis des siècles les vertus du pangolin sur les rhumatismes par exemple, certains prétendent désormais qu’il guérit le cancer et le sida.
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Si l’épisode Covid-19 n’a pas donné lieu selon les chercheurs à des massacres irrationnels de pangolins, les mesures pour compliquer son commerce légal ou illégal n’ont pas non plus fait baisser le trafic. Il faut donc « le protéger urgemment ! »